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Le piège de Thucydide

    La crise actuelle du coronavirus par sa propagation foudroyante, a mis en exergue l’interconnexion entre les principales puissances économiques. La rivalité de plus en plus forte, entre une Chine qui affirme ses tendances hégémoniques, et des États-Unis en déclin relatif ; agite les tensions géopolitiques.  

De la guerre commerciale de 2018, à la suspension du financement américain de l’OMS pour cause de « sinophilie » exacerbée de cette organisation, en passant par la lutte autour des brevets, la rivalité sino-américaine devient de plus en plus l’élément structurant des relations internationales. 

 Les commentateurs sont prompts à parler de nouvelle guerre froide en prenant comme modèle la rivalité russo-américaine, mais en négligeant la dimension idéologique de ce conflit.  En effet, ces deux états adhérent tout deux à la mondialisation libérale actuellement en marche et en sont les eux principaux pôles bénéficiaires. De plus, ils se trouvent dans une situation d’interdépendance, puisque les Etats-Unis sont le principal client de la Chine, tandis que ceux-ci contrôlent une bonne part de la dette américaine. Ainsi, d’un point de vue strictement économique , aucun des deux n’a intérêt à un conflit. Au contraire, une intensification des échanges permettrait à leurs élites de maintenir leur domination. 

Par conséquent nous allons chercher ici à mettre en avant un autre parallèle historique permettant d’appréhender au mieux ce nouvel état de l’équilibre mondial.

Ce face à face entre une puissance émergente et une autre déclinante, fait peser des risques sur la paix mondiale.  On pourrait convoquer un certain nombre de précédents historiques, néanmoins c’est sur la matrice de la civilisation moderne, la Grèce antique, et sur son histoire qu’il faut s’appuyer. Le plus grand historien de cet époque Thucydide décrivit dans son ouvrage la Guerre du Péloponnèse, la guerre opposant Athènes la démocratique à Sparte l’oligarchique. 

Ce conflit eut comme cause profonde la peur de l’émergence de la puissance athénienne face à l’hégémonie spartiate. Ainsi, toute action des athéniens était vu comme hostile par Sparte, ce qui entraîna une escalade des tensions et finalement une guerre entre ces deux puissances, qui  mena la Grèce à sa ruine. 

Le parallèle avec la situation actuelle se fait aisément. Une Chine sûre d’elle et pleine de projets impérialistes fait face à la puissance dominante qui cherche à tout prix à maintenir sa domination.  Une propagande anti-chinoise ravivée par l’épisode du coronavirus  se met en place dans les pays occidentaux afin de maintenir l’hégémonie américaine. Une réorganisation autour de ces deux puissances s’opèrent, avec la volonté de renforcer l’OTAN du côté américain et la constitution d’un bloc des émergents du côté chinois avec les fameux BRICS. 

 Cela amène à la formation d »un concept présent dans les cercles académiques : Le piège de Thucydide . Celui-ci postule l’inéluctabilité d’une guerre entre une puissance émergente anciennement dominée et une autre déclinante risquant de perdre son hégémonie. L’élection de Donald Trump, sur un programme faisant de la Chine, la cause du déclin américain en est l’illustration. De même, la poigne de fer de Xi Jinping sur la Chine avec sa volonté de donner aux chinois « leur place au soleil » participe à la paranoïa américaine.  

Ce risque, réel, appelle à une prise de conscience généralisée concernant les ravages de l’impérialisme. C’est pourquoi plus que jamais, l’internationalisme reste la seule solution pour éviter de céder aux sirènes de la guerre. Seule une politique étrangère multilatérale, respectant les conventions internationales et  permettant à chaque état un développement harmonieux, permettra d’enfin réunir le genre humain divisé par le capitalisme mondialisé.