Depuis bientôt une semaine s’est mis en place à Besançon une ZAD (zone à défendre) s’opposant aux projets de construction de logements aux Vaîtes. Le fer de lance de cette opposition est constitué par l’association des jardins des vaîtes.Leur argumentation repose sur l’idée de protéger une zone « naturelle » et non urbanisée, du bétonnage qu’implique selon eux la construction de logements.
Ce projet dont les prémisses datent des années 60 est contesté depuis des années par les riverains, auxquels se sont joints des militants associatifs et politiques.
Je ne vais pas tourner autour du pot, je suis favorable à ce projet parce qu’il me semble aller dans la bonne direction concernant la nécessaire transition écologique et l’amélioration du cadre de vie des classes moyennes et populaires .
Commençons par les faits. Chaque année, pour maintenir sa population au même niveau, Besançon doit construire environ 500 nouveaux logements. Cela est lié aux changements dans la composition des ménages avec la quasi-disparition des très grandes familles avec 3,4 ou 5 enfants et l’augmentation du nombre de logements occupés par une seule personne. En conséquence, même sans augmentation de la population la demande de logements croît.
Passons rapidement sur la problématique des logements vides qui représentent à peu prés 10 % du parc de logements. Ce chiffre qui peut paraître élevé a comme cause ; soit le taux de « vacance frictionnel » ( moment où l’ancien locataire est parti et le nouveau ne s’est pas encore installé) normal dans une ville de plus de plus de 100000 habitants ; soit des logements T4 ou T5 ne correspondant pas aux demandes des locataires ; soit finalement des logements situés dans des quartiers que les gens cherchent à éviter pour différentes raisons ( peur de l’insécurité ,cadre de vie peu attirants, logement délabrés…) .
Ainsi face au refus d’habiter dans certains quartiers ( Planoise notamment) et à la difficulté de construire des logements à Besançon ,on remarque un flux de population allant de la ville centre (Besançon) à sa périphérie. Cela cause un étalement urbain de plus en plus fort qui transforme les villes autour de Besançon et bétonne des terres agricoles ou sauvage dans l’indifférence quasi-générale…. Ainsi si en moyenne sur un hectare dans Besançon même* on construit 50 logements , dans l’agglomération on en est à 8 logements par hectare*…. Regardons Braillans, Thise, Saint-Vit ou même des villes plus éloignés comme Rioz, en 10 ans celles-ci et d’autres encore ont toutes gagnés des habitants alors que Besançon stagne voire régresse… C’est un problème qu’on peut généraliser à l’ensemble des agglomérations françaises.
Or puisque les emplois continuent à être concentrés à Besançon, on a une augmentation du trafic routier via les mobilités pendulaires, puisque c’est la seule solution viable de certains péri-urbains pour venir travailler. Ce trafic accru entraîne une augmentation de la pollution et des nuisances qui pénalise les populations sur les trajets ( particulièrement les quartiers populaires le long des axes structurants comme le boulevard Blum) et participe à l’accroissement des émissions de gaz à effet de serre.Au-delà de cela se pose des questions plus spécifiquement bisontines comme le devenir du quartier de Planoise qui compte actuellement 25000 habitants. L’urbanisme de ce quartier héritier des conceptions d’après guerre, n’est plus adapté à nos conceptions de l’habitat ( appartement t4 ou t5, bâtiment de plus de 10 étages….) quand il n’est pas délabré ( ascenseur qui ne fonctionne pas, cage d’escalier décrépi…), c’est pourquoi la rénovation du quartier est nécessaire.Par contre il est hors de question de refaire les mêmes erreurs, on ne va pas se remettre à construire des bâtiments de 15 étages qui sont des passoires énergétiques et se délabrent en seulement quelques années…. C’est pourquoi la rénovation du quartier implique une baisse du nombre de personnes y vivant et donc la nécessité d’en reloger une partie ailleurs.** On ne rénove pas un bâtiment de 15 étages, on le détruit**. Et on en reconstruit d’autres plus petits de 3,4 étages maximum ce qui fatalement occupent plus d’espaces au sol…. Si on a la question sociale à cœur, si on l’a vraiment chevillé au corps , alors il est impossible d’accepter cette situation inégalitaire qui est la cause de fortes tensions exacerbées pendant le confinement.
Toutes ces considérations montrent selon moi la nécessité de construire dans la ville de Besançon des logements accessibles, bien desservis en transport en commun et permettant d’avoir un cadre de vie agréable. C’est là que la question du quartier des Vaîtes se pose en tant que lieu possible de construction .Disons le tout de suite, ce projet de construction de quartier aux Vaîtes est loin d’être parfait et il mérite d’être amélioré notamment sur les questions sociales et environnementales. Je ne serais pas le petit soldat de la municipalité défendant par principe un projet parce qu’il serait soutenu par l’actuel majorité. Les différents recours concernant la zone humide des noues et la pression de certaines organisations pour améliorer l’aspect social ont déjà fait infléchir le projet mais il reste encore du travail et il faut le mener.Néanmoins, le projet tel qu’il est, va déjà selon moi dans le bon sens, on passe d’un quartier avec 0% de logements sociaux à un quartier qui en aura 20 % grâce à ces nouvelles constructions, de plus le projet prévoit 20% supplémentaires de logements considérés comme « abordables ». On peut considérer que ce chiffre de 20% de logements sociaux est insuffisant et se battre pour en augmenter le volume, mais il reste un mieux par rapport au néant actuel. De plus, la proximité avec la ligne de tram favorise l’utilisation des transports en commun au détriment de la voiture ce qui réduit les différentes nuisances.Bien entendu, il sera nécessaire de préserver la biodiversité de cette zone en aménageant les nouveaux logements de manière à limiter l’impact sur les éco-systémes naturels, mais encore une fois refuser la construction aux Vaîtes, mènera inévitablement à un étalement urbain accru ,qui bétonnera l’ensemble du grand Besançon et aggravera les actuels problèmes de congestion automobile.
Pour finir la question des jardins me semblent finalement assez dérisoire lorsqu’on met cela en rapport avec les graves problématiques énumérées au-dessus, comment vouloir défendre son petit jardin personnel, lorsque des gens vivant dans des conditions déplorables attendent d’être relogés ? On est en plein dans le phénomène not in my backyard (pas chez moi) ou en théorie, on a les plus belles intentions du monde mais quand ça concerne son chez soi on refuse les efforts nécessaires….Néanmoins, bien entendu ,sans remettre en cause les constructions de logements, préservons les jardins, si ce n’est pas possible tentons avec chacun de trouver une solution mais ne préférons pas les jardins de quelques personnes à l’amélioration de la vie du grand nombre….
Pour terminer je dois bien avouer ma peur face au développement de cette pensée écologiste conservatrice voire réactionnaire prête à jeter par dessus-bord toute pensée sociale en utilisant l’écologie comme arme face aux intérêts des classes populaires. Ainsi face à cette écologie champêtre, je préfère défendre une écologie populaire qui met au cœur de sa mission la défense des intérêts des classes populaires. L’écologie sera sociale ou ne sera pas.
Je suis candidat sur la liste mené par Anne Vignot et militant communiste mais je m’exprimé en mon nom